Point de vue sur les dépenses publicitaires : comportement du marché publicitaire canadien en 2021 et ce que cela signifie pour le marché à l’aube de 2022?

26 janvier 2022 | Kelly Fedoruk, directrice principale, Solutions clients, Standard Media Index (SMI)

Imaginez ceci. Nous sommes au 1er trimestre de 2020. Le marché publicitaire canadien est en croissance par rapport à l’année précédente puisque les dépenses publicitaires des plus grands annonceurs nationaux ont augmenté de +3 % en janvier et février par rapport à la même période de 2019. Puis, en mars, la pandémie a pris le dessus, les budgets publicitaires ont été retirés du marché et le Canada a dû affronter douze mois consécutifs de glissement annuel, avec des pertes à deux chiffres au cours des cinq premiers mois. Même la période traditionnellement forte des vacances au quatrième trimestre a enregistré des pertes, terminant en baisse de -4 %.

Il y avait de l’espoir pour 2021, mais l’année s’est amorcée lentement avec des dépenses durant les mois de janvier et février qui sont restées sous les niveaux qui existaient avant la pandémie. Mars 2021 a été le premier mois où le Canada a vu les dépenses publicitaires, tous médias confondus, dépasser les niveaux de mars 2020 et 2019. Le Canada rebondissait-il enfin? Les annonceurs se sentaient-ils assez confiants pour recommencer à investir? Peut-être! Mais, pas si vite!

Le deuxième trimestre s’installe avec des dépenses publicitaires toujours en baisse de -6 % par rapport au deuxième trimestre de 2019. Si le Canada avait l’espoir de revenir au niveau d’investissements d’avant la pandémie en 2021, il lui faudrait attendre au deuxième semestre. Personne n’a été déçu!

Juillet a commencé le trimestre en force, en hausse de +71 % et de +19 % par rapport à juillet 2020 et juillet 2019 respectivement. Le mois d’août a poursuivi la tendance, en hausse de +24 % par rapport à 2020 et de +21 % par rapport à 2019, et septembre a complété le trimestre en hausse de +12 % et de +10 % pour les mêmes années.

Le troisième trimestre de 2021 s’est révélé le premier trimestre complet où les dépenses publicitaires ont surpassé les niveaux d’avant la pandémie. SMI déclarait alors que le marché canadien n’était plus en mode de reprise, mais qu’il s’était officiellement rétabli.

Le quatrième trimestre poursuit sur cette lancée avec une hausse, en octobre, de +18 % et de +13 % par rapport à 2020 et 2019 respectivement. Novembre 2021 affiche les dépenses publicitaires les plus élevées des cinq années de suivi de ce type de données par SMI et s’inscrit comme le sixième mois consécutif où le Canada enregistre une croissance par rapport à 2020 et 2019. Tous les indicateurs révèlent actuellement que le Canada a terminé 2021 dans une position de croissance par rapport à 2020 et 2019 et que le pays continuera de croître de manière stable en 2022. Afin de mettre la reprise en Amérique du Nord en contexte, SMI estime que 17 milliards de dollars (USD) publicitaires ont été perdus aux États-Unis en raison de la COVID-19.

Évolution du mix média

Le passage des dollars publicitaires des médias traditionnels vers les médias numériques est loin d’être un nouveau phénomène. Le marché canadien de la publicité constate ce transfert de dollars depuis un certain temps déjà. Dès 2017, les médias numériques s’accaparaient la majorité des parts des investissements publicitaires avec quarante-deux pour cent. Avant les pertes induites par la pandémie de 2020, les médias numériques prenaient 48 cents de chaque dollar publicitaire. La télévision linéaire suivait de près avec 36 cents de chaque dollar. Ensemble, ces deux canaux représentaient donc 84 % de tous les investissements publicitaires, tous médias confondus, au Canada.

Au cours des douze mois consécutifs de baisse observée sur le marché à partir de mars 2020 par rapport à l’année précédente et tous médias confondus, les médias numériques n’ont connu que cinq mois consécutifs de pertes.

Au second semestre de 2020, les différents types de médias numériques, y compris les moteurs de recherche, les réseaux sociaux et la vidéo en ligne (OLV), ont commencé à constater une croissance, malgré la réduction des dollars publicitaires globaux. En effet, la part des investissements publicitaires numériques a fait un gros bond en peu de temps alors que les annonceurs misaient sur les capacités d’optimisation et la souplesse des publicités numériques tout en mettant à profit l’achalandage accru des canaux tels que les moteurs de recherche et les réseaux sociaux.

Certains de ces gains de parts par les médias numériques se sont faits au détriment de la télévision linéaire qui était tombée à 32 % au cours du dernier semestre de 2020, mais la majeure partie de l’augmentation des investissements numériques provenait d’autres types de médias traditionnels tels que la radio terrestre et l’affichage extérieur statique dont les investissements sont tranquillement passés à l’audio numérique et à l’affichage numérique.

Alors que le marché s’est normalisé et redressé en 2021, la part des dépenses publicitaires numériques n’est pas revenue au niveau d’avant la pandémie. En 2021, celle-ci était de 56 %, tandis que la part de la télévision linéaire était de 35 %. Ensemble, ces deux canaux représentaient donc 91 % de tous les investissements publicitaires, tous médias confondus au Canada, soit un gain de +7,0 points par rapport à l’année prépandémie de 2019.

La part des investissements numériques a flirté avec les 60 % trois mois en 2021, ce qui indique que l’accélération de la croissance des parts entraînée par la pandémie se maintiendra en 2022. Ainsi, les médias numériques continueront d’accaparer la majeure partie des investissements publicitaires au Canada, particulièrement en raison de la croissance continue des moteurs de recherche et des réseaux sociaux. D’autres domaines de croissance à surveiller sont l’audio numérique et l’affichage numérique. Attendez-vous à ce que le paysage de la télévision par contournement (OTT) et la télévision communautaire (CTV) se développe au Canada à mesure que les offres augmenteront, bien que cela se fera à un rythme plus lent que pour nos homologues américains.

Catégories publicitaires – Les gagnants et les perdants

Les douze groupes de catégories de produits suivis par SMI étaient en hausse en 2021 par rapport à 2020. La plupart ont enregistré des gains à deux chiffres et certaines des plus fortes croissances touchaient les secteurs suivants : vêtements et accessoires (+97 %), services de voyage (+86 %), bien-être (+48 %), affaires générales (+46 %), divertissement et médias (+36 %), technologie (+33 %) et services financiers (+33 %).

Toutefois, compte tenu de la réduction du marché en 2020, mieux vaut comparer les investissements à ceux de 2019 pour obtenir une référence plus précise. Seuls cinq des groupes de catégories de produits de SMI ont connu une croissance à deux chiffres en 2021 lorsque comparés à 2019 : technologie (+55 %), vêtements et accessoires (+40 %), bien-être (+40 %), biens de consommation emballés (BCE) (+25 %) et restauration (+22 %).

Sur le plan du volume, les trois secteurs d’activité ayant investi le plus en 2021, tous médias confondus, sont ceux des BCE, de l’automobile et des services financiers. Seul le secteur des BCE a connu une croissance à deux chiffres en 2021 par rapport à 2020 et à 2019. L’automobile (une catégorie largement touchée par les défis de la chaîne d’approvisionnement et de fabrication) a diminué de -18 % en 2021 par rapport à 2019. Les services financiers ont connu une certaine croissance par rapport à 2019, mais celle-ci était faible à +5 %.

Dans le secteur des BCE, les boissons (alcoolisées et non alcoolisées) étaient en hausse par rapport aux deux années, tout comme la nourriture et les soins personnels. Ce sont toutefois les produits ménagers qui ont connu les plus fortes hausses, soit +35 % et +66 % par rapport à 2020 et 2019 respectivement.

Le secteur des BCE affiche les plus importantes dépenses chaque mois en 2021 et cette tendance devrait se poursuivre en 2022. Parmi les autres catégories qui devraient rester solides en 2022, citons les industries pharmaceutique (qui a connu des gains en 2021 par rapport aux deux années précédentes), du bien-être et de la vente au détail. Dans cette dernière catégorie, les détaillants en ligne ont connu une croissance, en 2021, de +143 % et de +72 % par rapport à 2020 et 2019 respectivement et cette croissance devrait se poursuivre en 2022.

Ces informations sont tirés du système de données Core de Standard Media Index au Canada, lequel est alimenté directement par les principales sociétés de portefeuille et agences indépendantes au pays. Source : SMI Core Canada excluding SMI Pool.

 


 

Kelly Fedoruk, directrice principale, Solutions clients, Standard Media Index (SMI)

Kelly a plus de vingt ans d’expérience en publicité, en recherche et en marketing. Avant SMI, Kelly occupait le poste de directrice de la recherche chez Publicis Media, et à ce titre, travaillait avec les plus grandes marques et les plus grands éditeurs de tous les types de médias, tant linéaires que numériques. Sa passion pour la mesure média et les données lui permet de comprendre le marché canadien et de créer des informations exploitables pour l’industrie. Dans son rôle actuel chez SMI, elle établit et maintient les relations avec les clients et les agences en plus de piloter le développement de produits pour assurer le plus haut niveau de service à la clientèle.